Peut-on responsabiliser sans culpabiliser ? Comme la souffrance peut causer de la culpabilité, l’un des buts d’une cure psychanalytique est précisément de passer avec douceur et précaution de ce dont je m’accuse à ce dont je peux répondre.
Mais peut-on responsabiliser sans culpabiliser ? Une question qui touche à la fois la psychanalyse et l’éducation.
Avec Caroline Eliacheff Pédopsychiatre et psychanalyste
Si vous connaissez des psychanalystes ou des personnes qui ont fait une analyse, vous aurez constaté qu’ils ne sont pas forcément moins coupables ni plus responsables que les autres.
Elle se manifeste sous différentes formes : un malaise après une dispute, une réflexion sur un choix passé, ou même une honte subtile qui persiste dans votre quotidien. Mais qu'en est-il vraiment de cette émotion si complexe ? Pourquoi semble-t-elle parfois nous contrôler ? Et comment la notion de responsabilité s'entrelace-t-elle avec la culpabilité ?
En vous plongeant dans ces réflexions un tantinet psychanalytiques et existentielles, explorons pourquoi la culpabilité s’immisce souvent dans notre vie et comment nous pouvons apprendre à mieux comprendre notre relation avec elle. Sigmund Freud, Jacques Lacan, et le psychiatre existentiel Irvin Yalom apportent des perspectives différentes mais complémentaires sur ces émotions, et toutes offrent des pistes pour réfléchir à notre manière de gérer nos choix et nos erreurs.
Commençons par comprendre pourquoi la culpabilité semble être une compagne si tenace dans votre vie, et comment elle diffère fondamentalement de la responsabilité.
Ce poids que vous portez semble insupportable, et pourtant, vous ne parvenez pas à le déposer. Mais d'où vient cette culpabilité persistante ? Pour Freud, cela remonte à la création de votre Surmoi — cette instance intérieure que vous avez construite dès votre enfance à partir des interdits parentaux, sociaux et culturels (Freud, 1923). Cette voix implacable vous dit ce qui est bien et mal, vous juge sévèrement dès que vous vous écartez du chemin tracé. Ce juge intérieur, c’est celui qui vous fait croire que vous êtes coupable, même lorsque votre "faute" est minime, voire inexistante.
Jacques Lacan, disciple de Freud, va encore plus loin en affirmant que « la seule chose dont on puisse être coupable, au moins dans une perspective analytique, c’est d’avoir cédé sur son désir » (Lacan, 1959-1960). Cette phrase frappante vous invite à réfléchir : est-ce que votre culpabilité pourrait-elle être liée à un renoncement profond à vos désirs, à ce qui vous anime vraiment ?
Un mécanisme psychique que vous avez internalisé pour vous protéger d’une faute imaginaire ? Dans certains cas, la culpabilité est tellement enfouie qu’elle devient inconsciente, se manifestant par des comportements auto-destructeurs ou des sentiments d'indignité (Nos Pensées, 2023).
Pourtant, ces deux concepts sont fondamentalement différents. La culpabilité est une émotion qui vous envahit lorsque vous pensez avoir commis une faute, parfois même irrationnellement. Elle s’accompagne souvent de honte, de tristesse et de colère envers vous-même (De Sousa, 2023). La responsabilité, quant à elle, consiste à reconnaître objectivement vos actions et leurs conséquences, sans vous juger excessivement.
Irvin Yalom, psychiatre existentiel, nous rappelle que la responsabilité est inévitablement liée à la liberté. Vous êtes responsable de vos choix et de vos actes, et cette liberté vous place face à un fardeau existentiel (Yalom, 1980). Vous avez peut-être peur de cette liberté, car elle vous oblige à faire des choix, à prendre en charge votre vie. Mais c’est aussi cette même liberté qui vous permet de créer votre propre chemin. Comme Yalom le souligne, « il est effrayant de réaliser qu’il n’y a pas de manuel de la vie, qu’il n’y a pas de réponse toute faite » (Yalom, 2008).
Vous ne la percevez pas clairement, et pourtant, elle guide vos comportements, vous pousse à l’auto-sabotage, vous enferme dans une spirale de mal-être. Elle peut être liée à des désirs réprimés, des conflits intérieurs non résolus, ou à des événements passés dont vous vous sentez, à tort, responsable. Par exemple, des désirs jugés inacceptables par votre Surmoi, ou encore un sentiment de faute lié à des situations sur lesquelles vous n’aviez aucun contrôle, comme des disputes parentales dans votre enfance (Nos Pensées, 2023).
Lorsque vous êtes pris dans cette culpabilité inconsciente, elle peut se manifester par des sentiments d’anxiété, de mélancolie, ou même des comportements auto-destructeurs. Vous vous punissez pour des fautes imaginaires, vous vous sentez indigne de bonheur. C’est un combat intérieur qui peut durer toute une vie si vous n’en prenez pas conscience.
Pourquoi vous tourmentez-vous ainsi pour des détails que d’autres semblent ignorer ? Cela pourrait être un mécanisme de surcompensation. Vous voulez tellement être à la hauteur des attentes de votre Surmoi ou de la société que vous vous punissez pour les moindres écarts (De Sousa, 2023). Cette culpabilité est souvent irrationnelle, mais elle est amplifiée par la répétition des pensées négatives. Vous vous dites sans cesse : « J’aurais dû faire mieux », « Pourquoi ai-je fait cela ? », et cela ne fait qu’alimenter le cercle vicieux de la culpabilité.
Cette auto-flagellation est une forme d’autopunition, qui vous donne l’illusion d’avoir un contrôle sur la situation. Vous pensez pouvoir corriger vos erreurs en vous infligeant cette souffrance mentale (E-psychiatrie, 2023). Mais en réalité, cela ne fait que prolonger la douleur.
Accepter la responsabilité de vos actes et de vos choix est l’un des défis les plus difficiles que vous pouvez rencontrer. Yalom décrit cette responsabilité comme un fardeau existentiel inévitable. Vous êtes libre de vos choix, mais cette liberté vous expose à l’anxiété. Car accepter la responsabilité, c’est reconnaître que vous ne pouvez pas blâmer le monde extérieur pour vos échecs ou vos erreurs (Yalom, 1980). Vous seul(e) êtes responsable de vos décisions.
Cependant, la responsabilité ne doit pas être vue uniquement comme un fardeau. C’est aussi une libération. Lorsque vous acceptez que vous êtes l’artisan de votre propre vie, vous cessez d’être prisonnier de la culpabilité. Vous pouvez alors vous pardonner vos erreurs et avancer avec plus de clarté et de liberté.
Pourtant, comme l’enseigne la psychanalyse et la thérapie existentielle, la clé est de comprendre cette culpabilité, d’en révéler les origines inconscientes, et de la replacer dans le contexte de vos désirs et de vos valeurs (Freud, 1923 ; Yalom, 1980). Vous ne pourrez peut-être jamais vous en débarrasser complètement, mais vous pouvez apprendre à la gérer, à la transformer en une prise de conscience positive.
Mais c’est aussi le chemin vers la liberté. Vous n’êtes pas condamné à être esclave de vos fautes passées ou de vos regrets. Vous avez le pouvoir de choisir, d’assumer vos décisions et de tracer votre propre voie.
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