Comment reconnaître la dépression chez mon enfant ?
10/10/2024

La dépression chez l'enfant : comment la reconnaître ?

La dépression chez les enfants peut se manifester par des signes tels que tristesse persistante, irritabilité, troubles du sommeil ou de l'appétit, et désintérêt pour les activités. Identifier ces symptômes précocement est essentiel pour comprendre le mal-être de l'enfant.

Votre enfant montre des signes inhabituels de fatigue, de repli sur soi ou d’irritabilité, et vous vous interrogez sur ce qui peut en être la cause.

La dépression chez l’enfant est une réalité peu connue mais bien documentée. Ce trouble affecte non seulement les émotions de l’enfant, mais aussi son comportement, ses relations sociales, et ses résultats scolaires. Bien qu’il soit souvent difficile pour les parents de reconnaître ces symptômes, il est important d’en comprendre les signes pour agir de manière éclairée.

Qu’est-ce que la dépression infantile ?

La dépression chez les enfants, tout comme chez les adultes, est un trouble de l’humeur qui se manifeste par une tristesse persistante, une perte d’intérêt pour les activités quotidiennes, et des changements physiques ou comportementaux. Cependant, contrairement à la dépression chez l’adulte, celle de l’enfant se manifeste souvent par des symptômes moins évidents ou plus difficiles à cerner. Selon une étude récente de Lachal et al. (2020), « la dépression chez les enfants peut être masquée par des troubles du comportement ou des problèmes scolaires, rendant le diagnostic complexe. »

Chez les enfants, la dépression peut se manifester par des signes variés : tristesse, irritabilité, fatigue, baisse d'énergie, troubles du sommeil, ou encore des plaintes somatiques fréquentes comme des maux de ventre ou de tête. Le comportement de l’enfant peut également changer : il peut devenir plus agressif ou au contraire plus apathique, et montrer un désintérêt marqué pour les activités qu'il appréciait autrefois.

Pourquoi un enfant pourrait-il être dépressif ?

La question de l'origine de la dépression chez l’enfant est délicate. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, la dépression infantile n’est pas nécessairement liée à un événement traumatique. Elle peut être causée par une combinaison de facteurs génétiques, environnementaux et psychologiques. Certaines études, comme celle de Sillans (2019), soulignent l’importance des antécédents familiaux et des facteurs biologiques dans le développement de la dépression chez les enfants : « la prédisposition génétique et les influences neurobiologiques jouent un rôle clé dans l’apparition des troubles de l’humeur chez les jeunes enfants. »

Outre ces facteurs biologiques, d'autres éléments peuvent contribuer au développement de la dépression infantile. Le stress lié à l’école, les relations sociales, ou les tensions familiales peuvent également influencer l’état émotionnel d’un enfant. Bien que la dépression ne soit pas toujours déclenchée par un événement extérieur identifiable, l’environnement de l’enfant et la manière dont il gère les pressions externes peuvent jouer un rôle déterminant.

Quels sont les signes de la dépression chez l’enfant ?

Les signes de la dépression chez l’enfant peuvent varier considérablement en fonction de l’âge et du tempérament de l’enfant.

Il n’est pas rare que les parents ne reconnaissent pas immédiatement ces signes, car ils peuvent être confondus avec d’autres comportements typiques de l’enfance, comme l’opposition ou les crises de colère.

Voici certains symptômes qui peuvent indiquer une dépression chez un enfant :

Reconnaître la dépression chez l’enfant n’est pas toujours facile, car elle se manifeste différemment selon l’âge et le tempérament de chaque enfant. En tant que parent, vous pourriez observer certains changements subtils dans son comportement ou dans son état physique, mais il est parfois difficile de faire le lien avec un trouble dépressif. Voici un éclairage sur les symptômes les plus fréquents, et sur la manière dont ils peuvent se manifester au quotidien.

Tristesse persistante ou pleurs fréquents

L'un des premiers signes de la dépression chez l'enfant est une tristesse constante qui ne semble pas liée à des événements précis. Si votre enfant pleure fréquemment, même en l'absence de raison évidente, cela peut être le signe d'une souffrance plus profonde. Contrairement aux émotions passagères dues à un chagrin temporaire, cette tristesse s’installe dans la durée. Par exemple, vous pourriez observer que votre enfant a du mal à profiter de moments habituellement joyeux, comme des anniversaires ou des sorties en famille. La tristesse devient une toile de fond omniprésente, un état émotionnel quasi permanent. Ce comportement peut sembler paradoxal, surtout chez des enfants que l’on perçoit naturellement pleins de vie et insouciants, mais il peut être le reflet d'un mal-être plus profond.

Irritabilité ou colère

Si la tristesse est souvent associée à la dépression, chez les enfants, l'irritabilité est un symptôme tout aussi courant, mais moins évident à détecter. Contrairement à l'idée reçue selon laquelle un enfant dépressif est forcément triste, certains enfants vont plutôt manifester leur malaise par une irritabilité accrue. Ils peuvent être facilement frustrés par des événements mineurs, réagir de manière disproportionnée, ou entrer dans des colères inexpliquées. Cette irritabilité peut se traduire par des conflits fréquents avec les frères et sœurs, des oppositions répétées aux consignes, ou même une agressivité envers les adultes ou les camarades de classe. Si ces comportements semblent nouveaux ou inhabituels pour votre enfant, ils peuvent masquer une détresse émotionnelle que l’enfant ne parvient pas à exprimer autrement.

Perte d’intérêt pour les activités

L’un des symptômes les plus révélateurs de la dépression est la perte d’intérêt pour des activités qui, auparavant, procuraient du plaisir. Si votre enfant cesse soudainement de participer à ses jeux favoris ou se désintéresse des sorties avec ses amis, cela peut être un indicateur important. Ce désengagement s’observe souvent dans les activités créatives ou sportives : un enfant qui aimait dessiner, jouer au football ou passer du temps avec ses camarades peut soudainement devenir apathique, préférant rester seul ou ne rien faire. Cette perte d'intérêt pour le monde qui l'entoure est un signe d'alerte majeur, car elle reflète un manque de motivation et une incapacité à ressentir du plaisir, deux caractéristiques clés de la dépression.

Fatigue ou perte d’énergie

La dépression peut également entraîner une fatigue intense chez l'enfant, même lorsqu’il n’y a pas eu d’activité physique ou mentale particulière. Vous pourriez remarquer que votre enfant semble constamment épuisé, même après une nuit de sommeil complet. Cette fatigue peut rendre les tâches quotidiennes, comme aller à l’école ou jouer, particulièrement difficiles. Un enfant en dépression peut paraître léthargique, manquant de l’énergie nécessaire pour interagir avec son entourage ou accomplir des activités simples. Cela va au-delà de la simple fatigue liée à une journée chargée ; cette perte d’énergie persiste jour après jour, contribuant à un cercle vicieux où le manque d’activité renforce l’état dépressif.

Changements dans le sommeil ou l’appétit

Les troubles du sommeil sont fréquents chez les enfants dépressifs. Ils peuvent avoir du mal à s’endormir le soir, se réveiller fréquemment la nuit, ou au contraire, dormir beaucoup plus que d'habitude. L'insomnie, tout comme l’hypersomnie (sommeil excessif), est un signe à ne pas négliger, surtout si ces troubles du sommeil sont récurrents. Le sommeil joue un rôle clé dans la régulation des émotions et de l’humeur ; un sommeil perturbé peut donc accentuer les symptômes dépressifs chez l’enfant.

L’appétit est un autre domaine où les changements sont courants. Un enfant dépressif peut perdre l’appétit, manger moins que d'habitude, ou, à l'inverse, manger en excès sans véritablement avoir faim. Ces fluctuations peuvent entraîner une perte ou un gain de poids soudain et inexpliqué. Il est important de prêter attention à ces changements alimentaires, car ils peuvent avoir un impact direct sur la santé physique et aggraver le malaise émotionnel.

Symptômes physiques fréquents

Il n’est pas rare que les enfants expriment leur mal-être psychologique à travers des symptômes physiques. Les plaintes récurrentes de maux de tête, de ventre ou encore de douleurs musculaires, sans cause médicale apparente, peuvent être des manifestations de la dépression. Ces douleurs, bien réelles pour l’enfant, peuvent masquer une détresse émotionnelle que l’enfant n’arrive pas à verbaliser. Les enfants plus jeunes, en particulier, peuvent avoir du mal à mettre des mots sur leurs émotions complexes, et les douleurs physiques deviennent alors un moyen indirect d’exprimer leur malaise.

Quels sont les signes de gravité à surveiller chez un enfant dépressif ?

La dépression chez l’enfant peut s’accompagner de manifestations particulièrement inquiétantes, dont certaines nécessitent une attention immédiate.

Bien que les symptômes de la dépression infantile puissent varier, certains signaux de gravité doivent alerter les parents et les professionnels, notamment lorsqu’il s'agit d'idées suicidaires. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les enfants peuvent exprimer des idées suicidaires dès un très jeune âge, parfois dès 5 ou 6 ans. Tout discours ou comportement en lien avec ces idées nécessite une évaluation attentive et approfondie.

Modifications comportementales significatives

Les premiers signes de dépression grave peuvent se manifester à travers des changements de comportement marqués.

Un enfant qui développe des troubles de l’apprentissage, fait preuve de régression (comme l’énurésie secondaire), devient hyperactif, ou se replie sur lui-même mérite une attention particulière. Le repli sur soi peut être l'un des indicateurs les plus subtils mais aussi les plus alarmants, surtout lorsqu'il s'accompagne d’une posture de souffre-douleur ou de comportements autodestructeurs, tels que des blessures fréquentes ou des accidents domestiques à répétition. Ces changements ne doivent pas être minimisés, car ils peuvent refléter une détresse émotionnelle importante.

Préoccupation exagérée au sujet de la mort

Il est également important de noter si l’enfant exprime une fascination ou une préoccupation exagérée pour la mort.

Cela peut se traduire par des questions fréquentes ou des pensées obsessionnelles autour de la mort ou du suicide. Ce type de comportement n’est jamais anodin chez un enfant, et mérite d’être pris au sérieux. L’enfant ne sait peut-être pas comment formuler son mal-être autrement, et cette fixation sur la mort devient alors une manière indirecte d’exprimer sa souffrance.

Somatisation du mal-être

Souvent, les enfants en détresse émotionnelle expriment leur malaise à travers des plaintes physiques récurrentes, comme des maux de tête, des douleurs abdominales, ou des douleurs diffuses sans explication médicale claire.

Ces symptômes somatiques sont courants chez les enfants dépressifs, surtout chez les plus jeunes qui n’ont pas encore les capacités verbales pour exprimer leurs émotions complexes. Un enfant qui se plaint régulièrement de douleurs physiques peut ainsi masquer une dépression sous-jacente qu'il n’arrive pas à formuler avec des mots.

Idées suicidaires et risques associés

L’évocation d’idées suicidaires chez l’enfant est un signal de gravité qui ne doit jamais être ignoré.

Si un enfant parle de se faire du mal, ou mentionne le souhait de ne plus vivre, cela nécessite une intervention immédiate. Ces idées peuvent être le reflet d'une souffrance intense, et même si l'enfant n'a pas nécessairement la compréhension complète de la mort, la présence de telles pensées est un indicateur clé d’une dépression grave.

Soyez particulièrement vigilant si ces idées suicidaires sont accompagnées de troubles psychiatriques associés, d'une impulsivité marquée, ou d'un isolement affectif. Une rupture affective récente, telle qu’un divorce, le décès d’un parent ou le départ d’un ami proche, peut aggraver le risque. De plus, un environnement marqué par la maltraitance, la violence ou le harcèlement scolaire constitue un facteur de risque important qui peut intensifier les pensées suicidaires chez l’enfant.

Changements récents dans l’environnement de l’enfant

Il est également essentiel de prendre en compte tout changement significatif dans l’organisation du quotidien de l’enfant, comme un déménagement ou un changement d’école. Ces bouleversements, bien qu’apparemment anodins, peuvent déclencher ou aggraver un état dépressif chez certains enfants, surtout si ces événements sont vécus comme des pertes affectives ou sociales importantes.

Comment la dépression affecte-t-elle la vie scolaire de mon enfant ?

La dépression chez l’enfant peut avoir un impact significatif sur ses performances scolaires.

Si votre enfant a toujours été un élève attentif et appliqué, une chute soudaine de ses notes ou un désintérêt pour les devoirs peut être un signe d'alerte. Comme le note Fombonne (2020), « la dépression chez les enfants affecte souvent leur capacité à se concentrer, ce qui entraîne des difficultés académiques et un manque de motivation. » Ces difficultés peuvent être confondues avec des troubles de l’attention, mais la dépression affecte aussi la motivation et l’estime de soi, ce qui complique encore davantage la situation.

Si vous avez remarqué que votre enfant semble distrait en classe, a du mal à suivre le rythme ou montre un désengagement progressif, il peut être utile d'explorer l'hypothèse de la dépression. Le repli sur soi ou l’isolement peuvent aussi affecter ses relations avec ses camarades, entraînant parfois une forme de marginalisation ou d’isolement social qui ne fait qu’aggraver son mal-être.

Est-ce que la dépression peut disparaître sans intervention ?

Certaines phases difficiles peuvent s’améliorer avec le temps, mais la dépression ne se résout pas toujours d'elle-même, surtout chez les enfants.

En effet, selon les spécialistes, une dépression non traitée peut s’aggraver et avoir des conséquences à long terme sur le développement psychologique et social de l’enfant. La dépression infantile peut avoir des répercussions sur l’estime de soi, la capacité à gérer le stress, et les relations sociales, et elle peut parfois conduire à des troubles de l’humeur à l’âge adulte.

Les parents peuvent être tentés d’attendre que les symptômes s’améliorent d'eux-mêmes, pensant qu'il s’agit simplement d’une phase passagère. Cependant, la dépression, lorsqu’elle est ignorée, peut devenir chronique. Selon une étude de Bui et al. (2022), « les enfants dépressifs qui ne reçoivent pas une aide appropriée sont plus susceptibles de développer des troubles de l’humeur à l’adolescence et à l’âge adulte. »

En conclusion

La dépression chez l'enfant est un trouble complexe qui peut passer inaperçu si les symptômes ne sont pas bien compris. Bien que les parents puissent se sentir démunis face à cette situation, reconnaître les signes est un premier pas pour aider l'enfant à appréhender ses difficultés émotionnelles. Les changements dans le comportement, les plaintes physiques récurrentes, les difficultés scolaires et l’irritabilité sont autant de signaux qui peuvent indiquer que l’enfant traverse une période difficile.

Même si cela peut sembler difficile à accepter, la dépression chez les enfants existe, et il est essentiel de la reconnaître tôt pour éviter des complications à long terme. Si vous avez des doutes ou des inquiétudes concernant le bien-être de votre enfant, il peut être utile de consulter un professionnel de la santé mentale pour obtenir un diagnostic approprié.

Références

Bui, E., Nisenbaum, L., & Bozzola, E. (2022). Impact de la dépression infantile sur le développement émotionnel et social. Revue de Psychiatrie Infantile, 38(2), 114-125.

Fombonne, E. (2020). Troubles de l’humeur et comportement chez l’enfant dépressif. Psychopathologie de l'Enfant et de l'Adolescent, 45(3), 217-230.

Lachal, C., Martin, C., & François, A. (2020). Dépression et troubles du comportement chez l’enfant : Difficultés de diagnostic. Archives de Psychiatrie et de Psychologie Infantile, 29(4), 152-163

Sillans, C. (2019). La dépression infantile : Une approche multifactorielle. Cahiers de Psychologie Enfantine, 22(1), 45-56.

Par Frédérique Korzine,
psychanalyste à Versailles
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