Qu’est-ce que l’angoisse de castration ?
21/4/2025

Qu'est-ce que l'Angoisse de castration ? comprendre cette peur fondamentale qui structure le psychisme

Vous avez dit "castration" ? Le mot fait grimacer. Il évoque le drame, la douleur, un imaginaire un peu sanglant. Et pourtant, en psychanalyse, il est partout. Souvent mal compris, voire tourné en dérision, le concept d’angoisse de castration est en réalité l’une des clés majeures pour comprendre nos inhibitions, nos conflits, nos peurs les plus archaïques — et parfois aussi notre humour. Mais alors, de quoi parle-t-on vraiment ? Et pourquoi ce mot si chargé fait-il encore tant parler, un siècle après Freud ? Préparez-vous à découvrir que l’angoisse de castration, ce n’est pas une histoire d’anatomie, mais une affaire de perte, de limite, de séparation. Et qu’elle nous concerne tous, peu importe le genre, l’âge ou l’époque.

L’angoisse de castration : ce que c’est (vraiment)

Lorsqu’il fonde la psychanalyse, Sigmund Freud met en lumière une découverte centrale : pour devenir un sujet autonome, un enfant doit accepter de renoncer.

Il ne peut rester dans une illusion de toute-puissance éternelle. Il ne peut rester le centre du monde, ni le seul objet d’amour de sa mère. Il doit renoncer à l’idée qu’il pourrait être tout, tout avoir, tout posséder.

Et ce renoncement ne se fait pas sans douleur. Il s’accompagne d’une crise psychique fondatrice, une épreuve décisive : la castration symbolique.

⚠️ Ne confondons pas tout de suite !
Ici, le mot "castration" n’a rien de chirurgical, ni de concret. Il ne s’agit pas d’une menace réelle, mais d’un processus psychique essentiel.

C’est par cette castration symbolique que le sujet intègre la notion de manque, de limite, et la différence entre lui et l’autre. Autrement dit, il découvre qu’il n’est pas tout, qu’il ne peut pas être le phallus (c’est-à-dire l’objet du désir absolu pour l’Autre), et qu’il existe une loi qui structure les relations humaines.

C’est par la fonction du tiers que le sujet se structure. Lire : La fonction du père en psychanalyse.

Définition de l’angoisse de castration

L’angoisse de castration est la peur intense éprouvée par le sujet face à cette découverte fondamentale : il existe une perte, une limite, une impossibilité d’être le tout de l’Autre.

Chez l’enfant, cette angoisse se déclenche lorsque ses désirs entrent en conflit avec la loi symbolique — notamment lors du complexe d’Œdipe, que nous détaillerons plus loin.

Il découvre alors que le désir n’est pas libre, qu’il y a des interdits, des règles, des frustrations. Et cette confrontation crée une angoisse structurelle, une peur de perdre l’amour, la sécurité, voire une partie de soi.

Cette angoisse peut se manifester :

  • Par des peurs irrationnelles (être puni, mutilé, abandonné),
  • Par des symptômes corporels (phobies, inhibitions),
  • Par des troubles du comportement (colère, opposition, suradaptation),
  • Par un repli psychique ou un désinvestissement du lien social.

Pourquoi cette angoisse est-elle si fondamentale en psychanalyse ?

Parce qu’elle n’est pas un accident, ni un dérèglement.

Elle fait partie du développement normal du sujet. Pour Freud, puis Lacan, l’angoisse de castration est un passage structurant, un moment de bascule entre l’état fusionnel de la petite enfance et l’accès à la position de sujet, inscrit dans le langage, la culture, le lien.

Sans cette castration symbolique :

  • Il n’y a pas de différenciation entre moi et l’autre,
  • Il n’y a pas de désir, puisque le désir naît du manque,
  • Il n’y a pas d’interdit structurant (comme l’interdit de l’inceste, fondateur du lien social).

Autrement dit, la castration symbolique est le prix à payer pour exister dans le monde des humains. L’angoisse qu’elle suscite signale ce passage, cette coupure nécessaire entre le fantasme et la réalité.

Un repère fondamental dans la clinique

Dans la pratique clinique, reconnaître les manifestations de l’angoisse de castration permet de :

  • Comprendre certaines inhibitions massives (sexualité bloquée, peur de l’engagement, de la réussite),
  • Décrypter des troubles de l’autorité (difficulté à accepter une hiérarchie ou à se positionner),
  • Interpréter des angoisses diffuses et récurrentes chez l’enfant ou l’adulte,
  • Identifier des stratégies d’évitement du manque : surinvestissement du travail, quête de perfection, dépendance affective, compulsions sexuelles ou alimentaires.

L’angoisse de castration n’est donc pas un concept poussiéreux, réservé aux séminaires freudiens : c’est un outil clinique vivant, toujours d’actualité pour comprendre ce qui, en chacun de nous, résiste à la perte, à la limite, au renoncement.

Petit détour par le complexe d’Œdipe

Impossible de parler d’angoisse de castration sans faire un crochet par le complexe d’Œdipe.

Ce nom à consonance mythologique peut faire sourire ou effrayer, mais il désigne l’un des grands tournants du développement psychique de l’enfant. Et il a tout à voir avec la fameuse peur de castration.

Rappel express : qu’est-ce que le complexe d’Œdipe ?

Entre environ 3 et 6 ans, l’enfant traverse une période où il découvre l’existence des rôles sexués, de l’amour, du désir… et de la rivalité. Il se prend à aimer intensément le parent du sexe opposé (du moins symboliquement), tout en développant une forme d’hostilité ou de rivalité envers le parent du même sexe, perçu comme un obstacle à cette relation privilégiée.

  • Le petit garçon désire sa mère, veut “l’épouser” (selon ses mots d’enfant), et voit son père comme un rival.
  • La petite fille, elle, tourne son regard vers son père, et ressent souvent un désamour momentané pour la mère, qui ne lui paraît plus “suffisante”.

Cette configuration met l’enfant face à un conflit psychique intense : il aime, il désire, mais il découvre que ses désirs ne sont pas tout-puissants, qu’ils rencontrent des interdits, et que l’Autre — le parent — désire aussi quelqu’un d’autre.

Le complexe d’Œdipe reste un repère clinique fondamental.  Voir notre explication du complexe d’Œdipe.

C’est là que surgit l’angoisse de castration

À ce moment précis, une angoisse archaïque fait irruption : celle de perdre quelque chose de fondamental si l’on persiste dans ce désir. Ce quelque chose peut être :

  • L’amour du parent,
  • L’appartenance à la famille,
  • Une partie de soi-même (symboliquement représentée par le sexe, le statut, la parole...).

Freud nomme cela l’angoisse de castration : la peur, réelle ou fantasmée, d’être puni pour avoir désiré “trop fort”, ou “mal”.

Et cette angoisse n’est pas un bug du système, c’est une fonction de sécurité psychique. Elle interrompt le fantasme œdipien et met fin à l’illusion de toute-puissance. Autrement dit, elle fait grandir.

Le besoin de plaire à tout prix peut aussi trahir une peur du manque d’amour. Découvrir le trouble histrionique.

L’interdit, ce n’est pas la fin du monde… c’est le début du sujet

Le rôle du parent tiers (traditionnellement désigné comme le père, mais qui peut être joué par toute figure structurante) est ici fondamental. C’est lui qui pose la limite, incarne la loi du dehors, et permet à l’enfant de comprendre qu’il ne peut ni tout avoir, ni tout être.

Cela peut être vécu comme une perte, mais c’est cette perte qui ouvre à :

  • La différence des sexes et des générations,
  • L’entrée dans la parole et la symbolisation,
  • La possibilité de désirer autrement, plus tard, hors du cadre familial.

Sans cette rupture symbolique, pas de différenciation, pas de subjectivation. Le moi reste pris dans une illusion de fusion et d’omnipotence.

Œdipe au XXIe siècle : toujours d’actualité ?

Bien sûr, la structure familiale a changé.

Les modèles se sont diversifiés. Les rôles ne sont plus figés dans des stéréotypes genrés. Et pourtant, le complexe d’Œdipe reste un repère clinique précieux, car il ne parle pas uniquement de papa, maman et bébé — il parle de structure, de limite, de tiers, de désir et d’interdit.

Même dans une famille homoparentale, monoparentale ou recomposée, ce qui compte, c’est que l’enfant puisse :

  • S’identifier à un parent,
  • Différencier son désir de celui des autres,
  • Et surtout, renoncer à être l’objet central de l’Autre, pour devenir un sujet à part entière.

L’angoisse de castration : la gardienne de la séparation

Ce que l’Œdipe nous apprend, c’est que l’angoisse de castration n’est pas un problème à éviter, mais une étape à traverser.

Elle marque le passage de l’enfant roi à l’enfant qui accepte la différence, l’altérité, le manque.

Elle est le prix à payer pour accéder au désir véritable : un désir qui n’est pas fusionnel, mais qui accepte le jeu du manque, du langage, du temps.

Mais alors, elle ne concerne que les garçons ?

Non ! Et c’est l’un des malentendus classiques sur le concept de castration.

Chez le petit garçon, l’angoisse se cristallise autour de la peur de perdre son pénis, en découvrant que la fille "n’en a pas" — ce qui active fantasmes, inquiétudes et théorisations enfantines (elle l’a perdu ? il va m’arriver la même chose ?).

Chez la petite fille, ce n’est pas une castration redoutée, mais constatée. Ce que Freud a maladroitement nommé "envie du pénis" peut être relu aujourd’hui comme la perception d’un manque, d’une inégalité, d’une différence qui la pousse à rechercher une forme de compensation narcissique.

Dans les deux cas, l’enfant découvre que tout le monde n’a pas la même chose, que la différence existe, et que personne n’est tout. Cette reconnaissance de la limite — symbolique, corporelle, affective — est le socle du processus de subjectivation.

À quoi ressemble l’angoisse de castration chez l’adulte ?

On aurait tort de croire que l’angoisse de castration appartient exclusivement à l’enfance. En réalité, elle ne disparaît jamais totalement.

Elle change simplement de visage, se dissimule derrière d'autres symptômes, et s’exprime à travers nos choix, nos peurs, nos blocages quotidiens.

Chez l’adulte, cette angoisse inconsciente peut surgir dans toutes les sphères de la vie, dès qu’une situation réactive un sentiment de perte, de limite, ou de séparation. Et plus le sujet a du mal à accepter le manque, plus l’angoisse revient avec force.

Dans la vie professionnelle : la peur de perdre son pouvoir

Vous travaillez trop, vous contrôlez tout, vous ne délèguez jamais ? Ou bien vous refusez toute prise de risque, de peur de mal faire ?

Ces comportements peuvent masquer une angoisse de castration mal digérée, c’est-à-dire une peur inconsciente de perdre une place symbolique, une reconnaissance, ou une autorité intérieure.

Dans les structures narcissiques fragiles, on observe souvent une difficulté à tolérer l’échec, mais aussi la réussite — car réussir, c’est s’exposer à une chute potentielle, à l’envie de l’autre, au regard du père symbolique (le tiers, l’autorité, la loi). Cette tension se retrouve dans :

  • Le syndrome de l’imposteur (angoisse de ne pas mériter sa position),
  • La compulsion de surperformance (refus de reconnaître ses limites),
  • Ou au contraire, l’auto-sabotage, quand réussir devient menaçant.

Parfois, la peur de réussir cache une angoisse de castration mal symbolisée. Lire l’article sur l’auto-sabotage.

Dans les relations affectives : le piège de la dépendance ou du retrait

Aimer, c’est renoncer à être tout-puissant.

C’est accepter d’avoir besoin de l’autre, sans le posséder. Pour certains, cela ravive une angoisse archaïque : si je m’abandonne à l’autre, vais-je perdre ma liberté ? Mon identité ? Mon pouvoir ?

Et pour d’autres, aimer sans retour, ou vivre une rupture, ravive la peur d’être rejeté, abandonné, privé du lien originel. C’est une réactualisation du manque vécu dans l’enfance — et donc une expression très claire de l’angoisse de castration.

Elle se manifeste alors par :

Ici, ce n’est plus la loi du père, mais le désir de l’autre qui devient menaçant, car il rappelle qu’on ne peut pas être tout pour l’autre — ni l’avoir entièrement.

Dans la sexualité : entre inhibition et surcompensation

C’est probablement le terrain clinique le plus parlant pour observer les effets de l’angoisse de castration chez l’adulte.

Chez certaines personnes, elle se traduit par des inhibitions sexuelles : baisse du désir, anorgasmie, troubles érectiles, évitement du rapport sexuel… Ici, le corps dit non à un plaisir vécu inconsciemment comme interdit, dangereux, ou menaçant pour l’équilibre psychique.

Chez d’autres, au contraire, elle prend la forme d’une sexualité compulsive, tournée vers la performance, la domination, l’accumulation de partenaires. Mais derrière ce masque de toute-puissance sexuelle, on retrouve souvent un refoulé de vulnérabilité, de perte symbolique, de quête d’un pouvoir compensatoire.

Dans les deux cas, c’est la différence sexuelle, la loi du manque, et le fait de ne pas être tout-puissant qui posent problème.

Là encore, le sujet n’a pas pu intégrer la castration psychique comme une étape structurante, et oscille entre fuite du désir et déni du manque.

Dans la psyché : éviter la castration, fuir la subjectivation

Enfin, plus subtilement, certains sujets évitent l’angoisse de castration en se réfugiant dans la toute-puissance intellectuelle, l’isolement, l’identification à un idéal, voire dans des troubles obsessionnels. On rencontre alors :

  • Des personnes dans l’hypercontrôle mental,
  • Des parcours de vie figés par la peur de faire un choix (choisir, c’est renoncer),
  • Des difficultés à se différencier des figures parentales ou à construire une identité propre.

Il ne s’agit pas d’un caprice ou d’une immaturité, mais d’une angoisse fondamentale non traversée, d’un refus inconscient du processus de séparation-individuation.

Et tant que ce processus ne s’achève pas, le sujet reste prisonnier d’un fantasme de complétude, dans lequel le manque est vécu comme une menace d’effondrement.

Castration symbolique ≠ humiliation

Le terme “castration” fait souvent frémir — et on le comprend.

Dans le langage courant, il évoque une perte brutale, une atteinte humiliante, une forme d’anéantissement.

Cette connotation violente alimente de nombreux malentendus autour du concept de castration symbolique en psychanalyse.

Mais attention : la castration symbolique n’est ni une punition, ni une mutilation réelle, ni une dévalorisation du sujet. Elle n’a rien d’un rabaissement. Bien au contraire.

La chute de l’idéal peut générer une douleur narcissique intense. Lire l’article sur la blessure morale.

Ce que la psychanalyse appelle “castration”

Dans le cadre du développement psychique, la castration symbolique désigne l’acceptation intérieure d’une limite fondamentale : le sujet comprend qu’il ne peut pas être tout, avoir tout, savoir tout, combler totalement l’Autre ni être comblé en retour.

C’est la prise de conscience du manque comme condition de l’existence humaine.

Cette perte est symbolique, pas réelle. Elle marque la fin de l’illusion de toute-puissance infantile et l’ouverture vers une réalité partagée avec les autres.

Contrairement à une humiliation, la castration psychique ne diminue pas le sujet, elle le construit. Elle pose les bases de la subjectivation : je suis un être séparé, incomplet, désirant — et c’est à partir de ce manque que je peux entrer en relation.

La castration symbolique comme passage structurant

Plutôt que de voir en elle une blessure, il faut envisager la castration comme un passage fondateur : elle introduit la loi, le langage, la possibilité du lien social. C’est le tiers séparateur (souvent incarné par la fonction paternelle ou par toute figure d’autorité symbolique) qui vient signifier à l’enfant :

« Tu ne peux pas être l’objet unique du désir de ta mère »
« Il existe une altérité, un autre désir que le tien »
« Tu n’es pas tout, mais tu es un parmi d’autres »

Autrement dit, c’est grâce à cet interdit structurant que le sujet peut exister dans un monde de règles, de différences, de paroles échangées.

👉 Sans cette opération symbolique, l’enfant reste collé au fantasme de complétude, pris dans une relation fusionnelle sans issue, incapable de se différencier ni d’habiter son propre désir.

L’humiliation réelle, une toute autre affaire

Ce qui humilie véritablement un enfant ou un adulte, ce n’est pas la limite symbolique posée dans un cadre sécurisant.

C’est l’humiliation réelle, c’est-à-dire :

  • L’abus de pouvoir,
  • Le mépris de la subjectivité,
  • La négation de la parole,
  • La privation de reconnaissance.

Dans une éducation respectueuse, poser des limites n’est pas humiliant, c’est contenant. Ce n’est pas un rejet du sujet, mais un acte fondateur qui lui dit : « Tu n’es pas tout… mais tu es quelqu’un. »

Et en psychothérapie ?

Chez de nombreux patients, la confusion entre castration et humiliation réapparaît dans le transfert : la peur que le psychothérapeute juge, rabaisse, ou “castre”.

Cette peur est souvent l’indice d’un moment crucial dans le processus thérapeutique : le moment où le sujet est confronté à une limite nécessaire à son individuation, à une frustration fondatrice.

Le rôle du thérapeute, alors, n’est pas de caresser dans le sens du fantasme, ni de détruire l’idéal, mais d’accompagner cette traversée symbolique. Aider à faire la différence entre :

  • Une perte destructrice (humiliation),
  • Et une perte structurante (castration symbolique).

En psychothérapie : accueillir ce qui manque

C’est souvent là que tout se joue.

Lorsqu’un patient arrive en thérapie avec des symptômes d’angoisse, d’inhibition, de conflit intérieur ou d’auto-sabotage, il n’est pas rare qu’en arrière-plan, une angoisse de castration non symbolisée soit à l’œuvre.

Cette angoisse n’est pas toujours consciente. Elle se manifeste à travers des phrases du quotidien, anodines en apparence, mais très révélatrices :

  • « Je ne supporte pas de dépendre de quelqu’un. »
  • « J’ai peur d’être faible si je demande de l’aide. »
  • « Si je m’autorise à désirer, je vais perdre le contrôle. »
  • « Je préfère ne rien attendre, au moins je ne serai pas déçu(e). »

Autant d’indices d’un refus inconscient du manque, d’une tentative de tenir à distance la perte, l’imperfection, la vulnérabilité. Et donc, d’une impossibilité à intégrer la castration symbolique comme processus structurant.

Certaines personnes préfèrent manipuler plutôt que d’éprouver le manque. Comprendre l’entourloupette du pervers.

Le rôle du cadre analytique

Le cadre thérapeutique joue ici un rôle essentiel. Il devient le lieu où le patient peut :

  • Explorer ses représentations du manque et de la perte,
  • Revivre symboliquement l’expérience du tiers séparateur,
  • Traverser les affects liés à la souffrance d’être "non-tout",
  • Et progressivement, renoncer à la toute-puissance infantile.

Le travail analytique vise alors à relier l’angoisse présente à son origine symbolique. Il s’agit de mettre en lumière les fantasmes œdipiens encore actifs, les idéalités inaccessibles, les désirs interdits qui empêchent le sujet d’avancer.

Ici, le thérapeute ne "prend" rien au patient. Au contraire, il l’accompagne dans le processus d’appropriation de son manque, en tant qu’espace de désir et non comme faille à combler.

De l’angoisse paralysante à l’élan vital

Accueillir la castration symbolique, ce n’est pas “abandonner”, c’est accepter de ne pas tout maîtriser, de ne pas être tout pour l’autre, ni pour soi-même.
C’est transformer une perte imaginée comme anéantissante en condition d’accès au désir véritable.

En séance, cela peut se traduire par :

  • Une meilleure tolérance à la frustration,
  • Une capacité à faire des choix (sans attendre la perfection),
  • Un apaisement face à la différence (de l’autre, du genre, du corps, de la place…),
  • Une créativité retrouvée,
  • Un accès à une parole plus authentique, moins défensive.

Le sujet cesse alors de vouloir réparer une blessure narcissique impossible à combler, pour créer du sens à partir du manque.

Du manque subi au manque habité

En psychanalyse, le manque n’est pas un défaut, c’est ce qui rend le désir possible.

Sans lui, il n’y aurait ni mouvement, ni lien, ni altérité.
Un sujet qui parvient à symboliser sa castration devient capable de désirer sans se perdre, d’aimer sans se détruire, de se séparer sans se dissoudre.

Cela ne signifie pas qu’il n’a plus peur. Mais sa peur n’est plus paralysante : elle devient un signal, une limite, un indicateur psychique précieux.

Conclusion ? Ce que l’on perd… nous structure

Longtemps caricaturée, moquée ou mal comprise, l’angoisse de castration reste pourtant l’un des grands axes organisateurs de la vie psychique.

Elle ne concerne pas que le complexe d’Œdipe ou les premières années de l’enfance. Elle s’inscrit en creux de nos choix, de nos relations, de nos résistances et de nos inhibitions.

Accepter la castration symbolique, ce n’est pas se résigner, se soumettre ou perdre sa valeur. C’est consentir à ne pas être tout, pour pouvoir enfin être quelqu’un. C’est passer de la peur de manquer à la capacité de créer à partir du manque. C’est sortir de l’illusion de complétude pour entrer dans la parole, le désir, le lien à l’autre.

Dans une époque où la toute-puissance est glorifiée — productivité sans faille, amour idéal, perfection de soi —, il est urgent de réhabiliter l’incomplétude, la limite, l’altérité. Non pas comme des faiblesses, mais comme les fondations de toute subjectivité vivante.

Ce n’est pas parce qu’on accepte ses limites qu’on devient faible. Et si l’angoisse de performance en disait long sur nos idéaux ?

En psychanalyse, ce que l’on perd ne nous diminue pas. Cela nous structure, cela nous singularise, cela nous rend désirants.

Alors plutôt que de fuir ce manque qui nous habite, apprenons à l’habiter, à le penser, à en faire le moteur d’un sujet enfin libre d’être… imparfaitement vivant.

FAQ – Tout comprendre sur l’angoisse de castration

Comment savoir si je souffre d’une angoisse de castration ?

Si vous ressentez une peur de l’échec, une difficulté à vous affirmer, une tendance à éviter les conflits, ou une crainte intense du jugement, il se peut que vous soyez concerné(e) par une angoisse de castration.

Ce trouble se manifeste souvent par des inhibitions, des blocages relationnels, ou un besoin de contrôle excessif. Elle peut aussi s’exprimer par une hyper-réactivité aux limites posées par l’environnement. Une psychothérapie peut vous aider à identifier cette angoisse inconsciente et à en faire un levier de transformation.

L’angoisse de castration concerne-t-elle aussi les femmes ?

Oui. L’angoisse de castration chez la femme est bien réelle, bien qu’elle prenne souvent des formes différentes.

Elle peut se traduire par une quête de reconnaissance, une envie d’être tout pour l’Autre, ou une difficulté à accepter la différence des sexes. Dans une perspective psychanalytique, cette angoisse est liée à la construction du désir féminin, à la symbolisation du manque, et à l’intégration du fait que nul ne peut être tout-puissant. Elle concerne donc autant les hommes que les femmes dans leur développement psychique.

Peut-on surmonter l’angoisse de castration en thérapie psychanalytique ?

Oui, l’angoisse de castration peut être travaillée en profondeur en thérapie analytique.

Le but n’est pas de “supprimer” cette peur, mais de l’intégrer comme une étape structurante. Grâce au cadre thérapeutique, le patient peut mettre des mots sur ce qu’il vit, comprendre l’origine symbolique de cette angoisse, et apprendre à habiter le manque sans le vivre comme une dévalorisation. La castration symbolique devient alors un point d’appui pour construire un désir plus libre, une relation plus saine à l’Autre, et une identité plus stable.

Quel lien entre estime de soi et angoisse de castration ?

Lorsque l’angoisse de castration n’est pas symbolisée, elle fragilise souvent l’estime de soi.

Le sujet se sent dépendant du regard de l’Autre, redoute d’être insuffisant, ou cherche à compenser par une hyperperformance ou une posture de contrôle. À l’inverse, intégrer la castration symbolique permet de s’accepter comme sujet manquant mais complet, et de développer une estime de soi plus ancrée, plus stable. C’est un chemin vers l’autonomie psychique et la capacité à se désidentifier des idéaux surmoïques.

L’angoisse de castration peut-elle provoquer des symptômes physiques ?

Oui. Comme beaucoup de angoisses inconscientes, l’angoisse de castration peut se manifester à travers des symptômes somatiques : troubles du sommeil, fatigue chronique, pannes sexuelles, tensions musculaires, ou encore troubles digestifs.

Le corps exprime alors une souffrance psychique non dite, un refus du manque, ou une difficulté à accepter la séparation. Un accompagnement thérapeutique permet de relier ces symptômes à une problématique psychique plus profonde, et d’ouvrir un espace d’élaboration symbolique.

Par Frédérique Korzine,
psychanalyste à Versailles
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Psychanalyse, hypnose, coaching, supervision et thérapies brèves.

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