Si vous lisez ces lignes, c’est sans doute parce que vous êtes confronté(e) à une question délicate : votre ex-partenaire se sent-il remplacé par votre nouveau conjoint ? Une séparation est déjà une épreuve en soi, mais les dynamiques familiales et personnelles qui se jouent après coup peuvent être encore plus complexes à gérer. Nous savons qu’il est difficile de jongler avec ces émotions et ces tensions, que ce soit pour vous, votre ancien partenaire, votre nouveau conjoint, ou même vos enfants. Abordons ensemble les différentes facettes de cette situation pour vous aider à mieux comprendre ce qui se passe et, surtout, à trouver des pistes pour apaiser les relations.
Bien que la séparation ait marqué la fin de la relation, le lien émotionnel peut parfois persister, et l’apparition d’un nouveau partenaire ravive des peurs profondément enfouies : celle d’être remplacé, effacé, oublié.
Lorsque l’ex-partenaire voit quelqu’un d’autre occuper la place qu’il avait autrefois, un sentiment d’injustice et d’amertume peut émerger. Il ne s’agit pas simplement de jalousie amoureuse, mais bien d’une perte de statut et d’importance dans la vie de l’autre. Le nouveau conjoint incarne une sorte de rupture définitive, un rappel que l’histoire partagée appartient désormais au passé.
Selon Cloutier (2018), "la jalousie de l’ex-partenaire provient souvent d’un sentiment de dévalorisation, où l’arrivée d’un nouveau conjoint est perçue comme une menace directe à l'identité et au rôle qu'il ou elle jouait auparavant dans la relation". Ce sentiment peut expliquer pourquoi certains ex-partenaires éprouvent des difficultés à accepter que leur ancien amour trouve à nouveau le bonheur ailleurs.
Parce que, soudainement, une autre personne semble partager ou, pire, s’approprier une partie de ce qui était autrefois un domaine exclusif : le lien avec les enfants.
Cette crainte de perdre son rôle parental est au cœur de nombreuses tensions dans les familles recomposées. L’ex-partenaire peut avoir l’impression que le nouveau conjoint, en s’occupant des enfants ou en partageant des moments avec eux, menace sa place dans leur vie. Ce sentiment peut être exacerbé par l’incapacité de l’ancien partenaire à dissocier la relation conjugale passée du lien parental qui doit pourtant subsister.
Lamarche (2021) explique que "la peur de perdre son rôle de parent est un puissant moteur de jalousie chez l’ex-conjoint, qui peut voir dans le nouveau partenaire non seulement un rival amoureux, mais aussi une figure susceptible de s’immiscer dans sa relation avec ses enfants". Cela entraîne des comportements souvent hostiles ou manipulateurs, visant à maintenir un contrôle sur la situation.
Le nouveau conjoint, qu’il le veuille ou non, se retrouve souvent au centre de ces tensions.
Lorsque la jalousie devient omniprésente, il est difficile pour les parents de prendre des décisions rationnelles et équilibrées concernant leurs enfants. Chaque geste ou parole est interprété à travers le prisme de la rivalité. Des disputes surgissent pour des détails mineurs : la gestion des horaires de garde, les choix éducatifs, ou même les activités extrascolaires peuvent devenir des sujets de conflit.
Tremblay et Dubois (2019) notent que "dans un contexte de jalousie, la coparentalité peut rapidement se dégrader, les parents utilisant les enfants comme un moyen de maintenir une forme de contrôle ou de se venger de l’autre".
Dans l’esprit de l’ex, cette nouvelle personne n’est pas seulement une présence étrangère, elle est perçue comme une usurpatrice de tout ce qui était autrefois familier.
Il est courant que l’ancien partenaire projette ses propres peurs et insécurités sur le nouveau conjoint. Ce dernier incarne, aux yeux de l’ex, tout ce qu’il ou elle craint de perdre : le contrôle, l’autorité parentale, et même le respect des enfants. Cette peur, bien que souvent irrationnelle, peut provoquer des comportements destructeurs, tels que des tentatives de discréditer le nouveau conjoint ou d’éloigner les enfants de cette personne.
Selon Drapeau et al. (2020), "la figure du nouveau conjoint cristallise souvent les insécurités de l’ancien partenaire, qui perçoit cette personne comme une menace non seulement pour l’affection de son ex-conjoint, mais aussi pour sa propre autorité et place dans la famille". Ce sentiment de rivalité peut durer longtemps et envenimer les relations.
Lorsque l’ex-partenaire ressent une jalousie intense envers le nouveau conjoint, il peut inconsciemment manipuler les enfants pour qu’ils rejettent ce dernier. L’enfant est alors pris dans un conflit de loyauté, où il doit jongler entre les attentes de chaque parent. Cette situation génère un stress intense pour l’enfant, qui ne comprend pas pourquoi une simple affection pour une nouvelle figure adulte provoque autant de tensions.
Cloutier (2018) affirme que "les enfants se retrouvent souvent dans une position inconfortable où ils sont contraints de naviguer entre deux mondes en conflit, développant une anxiété liée à la gestion des attentes émotionnelles de leurs parents". Cela peut entraîner des répercussions négatives sur leur bien-être émotionnel à long terme.
Si cette jalousie est profondément enracinée dans des insécurités ou des blessures non résolues, elle peut persister pendant des années, rendant toute tentative de rapprochement difficile.
Certaines situations finissent par s’améliorer, lorsque l’ex-partenaire parvient à accepter la nouvelle réalité et à voir le nouveau conjoint non comme une menace, mais comme une personne qui peut contribuer au bonheur des enfants. Cependant, si la jalousie reste enfouie, elle peut ressurgir à tout moment, ravivant des tensions qui semblaient apaisées.
Elle est alimentée par des sentiments de remplacement, la crainte de perdre son rôle parental, et une compétition implicite qui peut durer des années. Si cette jalousie persiste, elle peut créer des tensions profondes, affectant non seulement les adultes, mais aussi les enfants qui se retrouvent au centre de cette dynamique émotionnelle tumultueuse.
Cloutier, M. (2018). Familles recomposées et défis émotionnels : L'impact de la rivalité entre ex et nouveaux partenaires. Revue de Psychologie Familiale, 23(2), 145-163.
Drapeau, P., Gagné, C., & Leclerc, F. (2020). La gestion des émotions dans les familles recomposées : Entre jalousie et sentiment d’abandon. Journal Francophone de Thérapie Familiale, 15(3), 58-74.
Lamarche, S. (2021). Coparentalité et recomposition familiale : Les enjeux relationnels et émotionnels. Revue Québécoise de Psychologie Parentale, 34(1), 102-118.
Tremblay, J., & Dubois, L. (2019). Quand la communication fait défaut : L'impact des conflits entre parents séparés sur le bien-être de l’enfant. Psychologie et Pratiques Parentales, 17(1), 72-89